10 raisons de ne pas revenir sur l’interdiction des néonicotinoïdes
France Nature Environnement et 30 autres organisations demandent aux parlementaires d’avoir le courage politique de s’opposer au projet de loi de dérogation à l’interdiction des néonicotinoïdes annoncé par le Ministre de l’Agriculture en août dernier : un projet dangereux pour la biodiversité, la santé environnementale et l’avenir de notre agriculture.
La décision de retrait des néonicotinoïdes en France, actée en 2016, est l’une des décisions politiques les plus fortes de ces vingt dernières années en matière de pesticides. Elle permet enfin d’envisager un nouveau modèle agricole basé sur l’agroécologie, l’optimisation et la régulation naturelle des prédateurs des cultures.
Or, le 6 août 2020, le Ministre de l’Agriculture annonçait vouloir lever l’interdiction sur l’utilisation des néonicotinoïdes pour la betterave sucrière en 2021. Cette dérogation, qui sera examinée à la rentrée par l’Assemblée Nationale, s’étendrait jusqu’en 2023 et n’est pas circonscrite –dans le texte soumis au vote– à la seule culture de la betterave.
En contradiction totale avec des centaines d’études scientifiques accablantes depuis les années 1990 sur l’impact des néonicotinoïdes sur la biodiversité, une telle mesure constituerait un nouveau recul en matière de transition écologique et sociale. Dans un courrier adressé aux parlementaires, nous listons 10 bonnes raisons de ne pas ouvrir cette boîte de Pandore, qui conduirait tant les agriculteurs que la biodiversité dans une impasse :
- Même si la betterave est récoltée avant floraison, l’usage des néonicotinoïdes aura un effet sur les pollinisateurs qui butineront les fleurs alentour, et plus largement sur l’ensemble de l’écosystème (oiseaux, insectes, espèces aquatiques…).
- En pratique, il est impossible de conditionner la dérogation aux conditions météorologiques comme le prétend le Gouvernement : comment savoir en avance si l’hiver sera doux ou non ?
- Une résistance des prédateurs des cultures et des pucerons aux molécules néonicotinoïdes commence d’ores et déjà à se développer, la chimie n’est donc pas une solution viable à long terme.
- La survie de la filière betterave ne dépend pas des néonicotinoïdes.
- Notre souveraineté alimentaire en termes de sucre n’est pas menacée.
- Protéger la biodiversité est essentiel pour notre production agricole et apicole, et au-delà pour la survie humaine.
- Des alternatives non chimiques aux néonicotinoïdes existent et doivent être soutenues.
- Accorder une telle dérogation ouvrirait la porte à des demandes émanant d’autres filières.
- Le principe de non-régression du droit de l’environnement est inscrit dans la loi.
- Il est temps de cesser de recourir à des palliatifs et de repenser en profondeur notre modèle agricole pour le rendre plus résilient et durable.
Le retour des néonicotinoïdes est donc une proposition incompréhensible, qui interroge fortement sur les réelles priorités du gouvernement au moment même où un renforcement des politiques publiques environnementales est annoncé au plus haut niveau de l’État.